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La semaine du droit public général (côté Cour de cassation)

Public - Droit public général
28/09/2020
Présentation des dispositifs des derniers arrêts publiés au Bulletin civil de la Cour de cassation, en droit public général.
Droits d’eau – compétence – Tribunal des conflits
« Selon l’arrêt attaqué (Grenoble, 11 décembre 2018) et les productions, M. X... (l’exploitant), exploitant agricole, est propriétaire de parcelles à Châteaudouble situées à proximité du canal de la Martinette alimenté notamment par la rivière Lierne. Il est membre d’une association syndicale autorisée (ASA) ayant pour objet la gestion de ces eaux. Au cours de l’année 2013, le Syndicat d’irrigation départemental drômois (le syndicat) a procédé à des sondages dans l’une de ces parcelles, sur laquelle se trouve une prise d’eau reliée au canal, destinée à l’irrigation pour les besoins de l’exploitation agricole.
Par arrêté du 25 mars 2014, le préfet de la Drôme a mis en demeure l’ASA de déposer une demande d’autorisation de prélèvement dans la rivière Lierne. Soutenant être titulaire de droits d’eau fondés en titre, l’ASA a saisi, aux fins d’annulation de l’arrêté, le tribunal administratif qui, par jugement du 21 juin 2016, a rejeté sa requête. L’exploitant a, alors, assigné le syndicat devant la juridiction judiciaire en vue de faire reconnaître l’existence de droits d’eau fondés en titre attachés aux parcelles dont il est propriétaire. Le syndicat a soulevé une exception d’incompétence au profit de la juridiction administrative.
(…) Vu l’article 35 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles :
Lorsque la Cour de cassation est saisie d’un litige qui présente à juger, soit sur l’action introduite, soit sur une exception, une question de compétence soulevant une difficulté sérieuse et mettant en jeu la séparation des ordres de juridiction, elle peut renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur cette question de compétence. L’instance est suspendue jusqu’à la décision de ce Tribunal.
Le litige présente à juger une question de compétence soulevant une difficulté sérieuse, dès lors que l’action en cause porte sur la reconnaissance d’un droit d’eau fondé en titre. Les recours contre les décisions prises par l’administration modifiant ou abrogeant un droit fondé en titre relèvent de la compétence de la juridiction administrative (CE, 1er février 1855, Compagnie du canal de jonction de la Sambre à l’Oise c/ Pruvost et consorts, rec. p. 100 ; CE, 9 mars 1928, Suderies, rec. p. 34 ; CE, 5 décembre 1947, Sieur Mounier, rec. p. 457). La présente action est dirigée contre l’administration et vise à la reconnaissance par celle-ci de l’existence d’un tel droit. Il n’est allégué aucune voie de fait et l’action a un lien étroit avec la police de l’eau et le service public de l’eau. Mais un droit d’eau fondé en titre pourrait être qualifié de droit réel immobilier (Civ.,17 novembre 1953, Bahier et Bodin c/ EDF, JCP G 1953, IV, p. 182 ; 3e Civ., 10 juin 1981, pourvoi n° 80-10.428, Bull. 1981, III, n° 116 ; 3e Civ., 6 février 1985, pourvoi n° 83-70.248, Bull. 1985, III, n° 24). L’action, qui porte sur l’existence d’un tel droit attaché à une parcelle appartenant à l’exploitant pourrait, de ce fait, ressortir au juge judiciaire. Il y a lieu, en conséquence, de renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur cette question de compétence, en application de l’article 35 du décret susvisé ».
Cass. 1re civ., 23 sept. 2020, n° 19-12.751, P+B*

*Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 28 octobre 2020
 

 
Source : Actualités du droit