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Maintien en activité au-delà de la limite d’âge : contrôle restreint du juge

Public - Droit public général
23/09/2020
Le Conseil d’État exerce un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation sur la décision d’une autorité refusant le maintien d’un agent en activité au-delà de la limite d’âge fixée par la règlementation.
Un chercheur au CNRS avait demandé une prolongation d’activité au–delà de la limite d’âge sur le fondement de l’article 1-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d’âge dans la Fonction publique et le secteur public, et s’était vu opposer un refus. Il avait ensuite obtenu gain de cause en appel. Le CNRS se pourvoit en cassation contre l’arrêt ayant annulé le refus de la demande de prolongation. Le Conseil d’État, se référant à une circulaire ayant le caractère de lignes directrices, exerce un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation sur la décision de refus opposée à l’agent.
 
 
La loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la Fonction publique de l’État, prévoit que « les fonctionnaires ne peuvent être maintenus en fonctions au-delà de la limite d’âge de leur emploi sous réserve des exceptions prévues par les textes en vigueur ». La loi relative à la limite d’âge prévoit que les fonctionnaires peuvent être maintenus en activité « sous réserve de l’intérêt du service et de leur aptitude physique ».
 
Le Conseil d’État estime que les dispositions applicables « confèrent à l’autorité compétente un large pouvoir d’appréciation de l’intérêt, pour le service, d’autoriser un fonctionnaire atteignant la limite d’âge à être maintenu en activité ».
 
Référence aux lignes directrices
 
En pareil cas, il convient de se référer aux lignes directrices, qui sont opposables devant le juge administratif, comme a pu l’indiquer à plusieurs reprises le Conseil d’État (CE, sect., 12 juin 2020, n° 418142, voir Droit souple : le REP étendu aux « documents de portée générale », Actualités du droit, 19 juin 2020 ; CE, 21 sept. 2020, n° 428683, voir REP : le requérant peut se prévaloir des lignes directrices, Actualités du droit, 23 sept. 2020).
 
Ainsi, la Haute cour déclare dans son arrêt : « Dans le cas où un texte prévoit l'attribution d'un avantage sans avoir défini l'ensemble des conditions permettant de déterminer à qui l'attribuer parmi ceux qui sont en droit d'y prétendre, l'autorité compétente peut, alors qu'elle ne dispose pas en la matière du pouvoir réglementaire, encadrer l'action de l'administration, dans le but d'en assurer la cohérence, en déterminant, par la voie de lignes directrices, sans édicter aucune condition nouvelle, des critères permettant de mettre en œuvre le texte en cause, sous réserve de motifs d'intérêt général conduisant à y déroger et de l'appréciation particulière de chaque situation. Dans ce cas, la personne en droit de prétendre à l'avantage en cause peut se prévaloir, devant le juge administratif, de telles lignes directrices si elles ont été publiées ».
 
Recrutement de jeunes chercheurs ou maintien en activité ?
 
En l’espèce, une circulaire du 28 avril 2014 prévoyait notamment de privilégier le recrutement des jeunes chercheurs plutôt que le maintien en activité des agents ayant atteint la limite d’âge.
 
Le Conseil relève que les juges d’appel avaient considéré que la circulaire « avait pour portée de fixer des règles impératives » et déclare que la cour en a ainsi retenu une inexacte interprétation.
 
Il considère que les lignes directrices fixées par la circulaire ne méconnaissent pas les dispositions de la loi du 13 septembre 1984 et écarte le moyen tiré de l’illégalité de la circulaire.
 
Réglant l’affaire au fond, le Conseil d’État relève que le refus de maintien au-delà de la limite d’âge était fondé sur l’absence de circonstance particulière propre à l’intéressé, et ne constate aucune erreur manifeste d’appréciation dans cette décision de refus. Il annule l’arrêt d’appel et confirme le rejet de la demande par le tribunal administratif de Versailles.
 
 
Sur la prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge de départ à la retraite, voir Le Lamy Fonction publique territoriale n° 715-28.
Source : Actualités du droit